9 - Changer de logiciel pour redonner sa souveraineté à notre politique agricole commune

Il est indispensable de construire une vraie politique agricole pour les raisons suivantes :

 

-  Les primes PAC en diminution ne peuvent pas assurer un revenu aux agriculteurs et cet assistanat dévalorisant a déjà trop duré.

- Réduire les contraintes et taxes absurdes pour les agriculteurs. Il est toutefois important que les agriculteurs continuent à contribuer au financement de la société sans être marginalisés.

- Les distorsions de concurrences entre états-membres qui devaient se réduire avec l’augmentation du niveau de vie, s’aggravent par l’absence de politique agricole et de règles internes communes.

- Restructurer l’agriculture en éliminant 50 % des paysans ne sert à rien en termes de compétitivité car cela ferait passer de 60à 120 ha les surfaces moyennes en France et de 17 à 34 ha la moyenne européenne, face à des pays neufs où les fermes font des milliers d’hectares.

- Le seul paramètre sur lequel il est donc impératif d’agir, c’est le prix de la matière première agricole qui, pour les grandes productions agricoles, a été divisé par 2 à 3 en 30 ans avec l’entrée de l’agriculture au sein de l’OMC.

 

Nous avons rappelé que la production agricole européenne est globalement déficitaire alors que depuis 40 ans on nous fait croire que les excédents sont généralisés.

 

Ce déficit est une chance car il peut nous permettre en cascade :

 

  • de rééquilibrer l’ensemble de nos productions agricoles en fonction des besoins du marché européen pour produire ce que la     population, de l’ensemble économique le plus riche au monde, consomme,
  • de ne plus avoir besoin de dégager des volumes sur des marchés d’exportation non rémunérateurs pour nos agriculteurs,
  • de fermer nos frontières aux importations, dès lors que l’UE n’exporte plus ces mêmes productions,
  • après cette régulation de nos productions agricoles européennes, de retrouver notre liberté d’action auprès de l’OMC, de     manière à pouvoir sortir l’agriculture, des accords commerciaux,
  • de mettre en place des droits de douane, l’attitude du Président Trump aux affaires créant une conjoncture favorable,
  • d’améliorer la qualité moyenne des produits consommés en réduisant les volumes importés,

 

Les nombreux bénéfices d’une bonne politique agricole commune et souveraine

 

Avec cette PAC refondée, les prix agricoles vont se redresser. Ceci va permettre d’améliorer sérieusement la condition sociale des agriculteurs. Ils ne se fatigueront plus avec des fermes ou des troupeaux démesurés dans une course effrénée à l’obtention du revenu minimal. La fuite en avant vers la productivité et l’agrandissement sera stoppée.

Si les agriculteurs vivent très correctement du fruit de leur travail avec des rendements moyens, ils n’auront plus besoin d’aller chercher les derniers quintaux ou les derniers litres de lait obtenus au moyen d’intrants contestés. Ce sera donc très bénéfique à la fois pour l’environnement et la qualité des aliments.

Au slogan « pas d’interdictions sans solutions »,nous répondons que la seule solution n’est pas le maintien des molécules phytopharmaceutiques. Une autre solution, bien meilleure, réside dans l’augmentation des prix agricoles.

Les marges confortées permettront de mieux subir les aléas climatiques et règleront la question des assurances récoltes ou climatiques coûteuses et trop mal adaptées.

Avec un meilleur revenu les agriculteurs pourront embaucher afin de ne plus être seuls sur leurs fermes. Cela leur permettra de ne plus travailler 54 heures par semaine, de prendre goût aux congés, de se marier plus facilement et donc de procréer. Leurs enfants ne chercheront plus à fuir le métier et l’agriculture sauverait ainsi ses savoir-faire.

 

Comment agir pour faire remonter simultanément l’ensemble des prix agricoles ?

 

Toutes les productions agricoles sont interconnectées entre elles : il ne faut pas créer de distorsions lors de ce redressement de l’agriculture afin de ne pas engendrer de nouvelles crises sur certains marchés. Cette réalité importante et méconnue de l’équilibre entre les productions agricoles n’a pas été abordée dans les notes précédentes. Son développement trouve sa place dans cette neuvième note pour la compréhension des propositions de redressement de l’agriculture.

 

L’équilibre entre les productions agricoles

 

L’agriculture répond aux sciences du vivant. Comme dans un corps humain où tous les organes sont liés entre eux, nos productions agricoles sont également connectées. En Europe, la culture qui est, ce que le diapasonest à l’orchestre, c’est le blé. Le prix de toutes les autres productions s’accorde sur celui du blé. Le blé est la culture la plus commune au sein de l’UE, on peut même dire la culture par défaut. Les prix des cultures contractuelles de légumes pour l’industrie ou de production de semences ne sont pas calculés par rapport à leurs coûts de productions mais par rapport aux cours du blé : l’industriel va donner à l’agriculteur un prix qui lui permettra d’obtenir une rémunération tout juste supérieure à ce qu’il aurait obtenu s’il avait semé du blé. De même, un agriculteur va cultiver des pommes de terre ou des oignons simplement si cela améliore un peu son revenu. Il se diversifie vers les marchés, généralement réservés aux petites exploitations, en cultivant des asperges ou des fraises pour également améliorer son revenu. Si les cours du blé remontent, il n’a plus besoin d’aller concurrencer d’autres agriculteurs spécialisés et peut vivre du fruit de son travail avec des productions de base.

Le blé est utilisé dans l’alimentation humaine et animale. Les prix de l’orge et du maïs sont influencés par ceux du blé car ces 3céréales se substituent dans la ration des animaux. Nos animaux d’élevages consomment également des protéines végétales pour lesquelles l’UE n’a pas protégé son marché. Nos agriculteurs n’en produisent donc que le quart des besoins du marché européen. Les protéines végétales sont importées au cours mondial sous forme de soja. Depuis que l’UE n’a plus protégé son marché des céréales, les prix européens ont fortement baissé. Les éleveurs de porcs et de volailles alimentent donc leurs animaux avec des aliments à très bas prix :protéines végétales importées et céréales subventionnées par la PAC. Nous avons ainsi créé une distorsion de concurrence entre les animaux nourris avec des aliments concentrés et les vaches allaitantes (bovins viande), nourris à l’herbe de nos prairies. C’est ce qui explique, en partie, une évolution de la consommation des viandes, avec une diminution de la viande de bœuf et une augmentation de la consommation de porc et de poulet. La restauration collective est particulièrement sensible à ces variations de prix. Les éleveurs de charolaises ou de limousines sont les agriculteurs qui ont les plus faibles revenus et les plus grandes fermes ! Là où ils le peuvent, ils cherchent à arrêter l’élevage, à labourer leurs prairies pour y semer, par défaut, du blé. Or nous sommes déjà excédentaires en blé.

 

Nous venons de démontrer :

 

1 - que des cours du blé, conjoncturellement bas, tirent à la baisse les prix de toutes les autres productions agricoles,

2 - qu’une baisse du prix des céréales entraine, par effet domino, une augmentation de la production de blé !

 

C’est un cercle vicieux ; l’agriculture ne répond pas à une logique industrielle et commerciale.

 

Ainsi, les artisans d’une vocation exportatrice en céréales– dans une UE globalement très déficitaire en grains – en approvisionnant des marchés au cours mondial dans les pays tiers, imposent aux agriculteurs européens des prix bas en céréales qui tirent les cours de toutes les autres productions agricoles à la baisse.

 

On ne peut être « en même temps » pour les exportations françaises de céréales vers les pays tiers et pour que tous les agriculteurs vivent dignement de leur travail grâce à des prix rémunérateurs. C’est antagoniste.

Si l’on veut que cet équilibre naturel redevienne vertueux, il faut évidemment que les importations n’arrivent plus comme un chien dans un jeu de quilles.

 

 

Comment limiter les importations actuelles non utiles et préjudiciables pour le revenu agricole ?

 

Les clauses miroirs sont contractuelles, résultant de l’accord des 2 parties. S’il s’agit de dénoncer des contrats ou de prendre des décisions unilatérales, elles ne sont donc pas le bon outil.

Les mesures miroirs sont incluses dans la réglementation européenne, elles ont été mises en œuvre pour l’utilisation des antibiotiques sur la viande bovine. La mise en place de telles mesures doit être justifié scientifiquement. Stopper l’importation d’aliments traités avec des pesticides interdits, permet de protéger les consommateurs. Mais comment prouver que des importations nuisent au revenu de nos agriculteurs ? Nous ne sommes plus dans le domaine scientifique mais économique et social voire culturel ?

Par exemple, les 5 molécules de la famille des néonicotinoïdes sont toutes autorisées dans les pays d’Amérique latine et employées sur les cultures de riz et de canne à sucre. De nombreuses autres molécules, interdites au sein de l’UE, sont autorisées au Brésil. Nous pourrions déjà nous protéger du sucre brésilien pour raison sanitaire.

La Colombie est un des principaux producteurs de sucre d’Amérique latine et exporte entre autres vers l’Union européenne. Les sucreries sont des usines qui cultivent des milliers d’hectares de terres louées aux anciens agriculteurs propriétaires qui n’ont donc plus d’activité agricole. Les sucreries sont situées en pleine campagne mais elles ont construit des villages privés avec logement des employés, écoles, médecins, magasins, le tout entouré de hauts grillages et sécurisé par des gardiens armés. Un état dans l’état…

Voulons-nous pousser nos coopératives à développer ce modèle en Europe ? En France, la surface moyenne cultivée en betterave à sucre est de 16,5 hectares par planteur. Nous ne pouvons donc pas rivaliser avec lesmodè les économiques et sociaux de production de sucre en Amérique latine. Pour cela, nous devons de manière unilatérale, au prétexte que nous ne voulons pas importer ce modèle de production, pouvoir stopper les produits qui peuvent s’avérer « toxiques » pour nos agriculteurs. Plutôt que d’importer du sucre de canne d’Amérique Latine, nous devons mieux valoriser cette production de nos départements d’outre-mer qui ne sont pas compétitifs face aux pays à faibles coûts. Rien qu’à la Réunion, la filière sucre représente 18 000emplois directs et indirects.

Taxer les importations de sucr e ou de tourteau de soja peut-il porter atteinte au développement économique ? Non, nous aurons toujours du sucre à mettre dans notre café ; il sera français, avec unemeilleure traçabilité et produit plus sainement. Actuellement, avec la suppression des quotas et la baisse du prix du sucre à la consommation, l’Etat a mis en place une « taxe soda » dont l’objectif est de diminuer la consommation de sucre. Cette taxe lui a rapporté 443 M € en 2023. Pourquoi taxer la consommation alors que l’on ne taxe pas les importations à bas prix ? Autant taxer à la source.

Quel consommateur se plaindrait d’une taxation du tourteau de soja ? Personne n’en mange directement ! Le coût de l’aliment de l’éleveur de volaille de porc et de vaches laitières augmentera mais il devra être répercuté sur le prix de vente à la production afin de ne pas léser les agriculteurs. Il y a de nombreuses économies de charges dont des taxes, à faire sur l’aval de la filière pour garantir un prix bas pour le consommateur. Si la raison d’être des taxes est la contribution qu’elles peuvent apporter aux budgets nationaux ou européen, alors, il est plus logique de taxer les importations que nos productions.

Dans les années 1980, alors que prix des céréales était 2 à3 fois plus cher qu’aujourd’hui, les viandes étaient à un prix plus abordable pour les catégories sociales défavorisées. Nous voyons encore ici que le problème du pouvoir d’achat est à rechercher ailleurs que dans les fermes.

Mettre des barrières tarifaires sur les produits du commerce international revient simplement à taxer des biens matériels. Quand ce matérialisme de l’Occident, dénoncé par Soljenitsyne en 1978 et aujourd’hui par J.D. Vance, menace la chute spirituelle de notre civilisation, il n’y a pas à hésiter. C’est le cas des importations de produits agricoles, à un prix inférieur au coût de production local qui mettent en péril une profession, un métier, une culture. Avec l’exception culturelle nous avons « taxé pour libérer » nos créations musicales et audiovisuelles d’une concurrence médiocre. Nous sommes issus d’une civilisation de paysans. Les mots agriculture et culture ont la même origine latine. Il n’y a pas de honte à nous protéger ; la taxe reste une arme pacifique et ce n’est pas une interdiction. Le consommateur qui veut se faire plaisir en achetant une bouteille de vin Chilien est prêt à payer quelques euros de taxes au motif que son geste d’achat n’a pas contribué au développement de la filière viticole française. La taxation est un outil de remise à niveau des prix comme les écluses du canal qui régulent la hauteur d’eau pour assurer le trafic. On pourrait cite régalement les divisions et les classes d’âge au football sans lesquelles la compétition n’aurait aucun attrait.

 

Quelques données sur le commerce agroalimentaire

 

Les données citées ici proviennent principalement du document « La place de l’Union européenne dans le commerce international de produits agricoles et alimentaires » présenté en décembre 2023 par Vincent Chatelier de l’INRAE et Thierry Pouch de l’APCA.

Au niveau de la répartition, en valeur, du commerce mondial des produits agricoles et alimentaires, les productions végétales représentent4 fois les productions animales. Boissons et poissons étant exclus de ce calcul.

Au niveau de l’UE27, les importations de productions végétales représentent (en valeur) 9 fois celles des productions animales. Le premier poste étant celui des « oléagineux, protéagineux et huiles »qui compte pour 20,9 % des importations européennes, suivit des fruits et légumes (16,6 %).

En 2022, le solde de la balance commerciale agroalimentaire de l’UE était de 30 milliards d’euros. Sans prise en compte des boissons, ce solde aurait été proche de zéro car l’excédent commercial pour les boissons était en 2022 de 29,5 milliards d’euros. A noter que le pays tiers avec le quel le solde a été le plus élevé est le Royaume-Uni : 30,1 milliards d’euros en 2022. Malgré le Brexit, le Royaume-Uni reste le premier client de l’UE pour l’agroalimentaire. Si le Royaume-Uni était resté dans l’UE, le solde de la balance commerciale agroalimentaire de l’UE28 aurait donc été nul.

Le second pays avec lequel l’UE27 a un solde très positif, ce sont les Etats-Unis avec 16,8 milliards d’euros en 2022. Nous comprenons que ce chiffre a de quoi agacer l’administration Trump qui souhaite relancer la production américaine dans tous les secteurs de l’économie. Nous importons des Etats-Unis du soja, du blé de force, du Bourbon et des oranges (principalement en Allemagne). Et nous exportons vers les Etats-Unis presque uniquement du vin et du fromage d’appellation.

Nous ne nourrissons pas de Cognac, de Chablis et de crottin de Chavignol. Les vins, spiritueux et fromages devraient être exclus de l’alimentaire et intégrés dans le luxe avec les parfums, la maroquinerie et la haute-couture. Louis Vuitton n’a-t-il pas déjà depuis longtemps intégré Moët et Hennessy ?  Les seuls parfums et cosmétiques représentent un excédent commercial de 20,1 milliards d’euros, rien que pour la France. Les produits agricoles de base sont loin derrière et les partisans de leur vocation exportatrice mettent nos paysans dans la situation de « la Grenouille qui se veut faire aussi grosse que le Bœuf ».

 

Nous avons vu que les produits animaux étaient 4 fois moins échangés que les produits végétaux au niveau du commerce international. Mais, au sein de l’UE les productions animales contribuent à un fort excédent commercial qui est passé d’environ 10 milliards d’euros en l’an 2000 à 50milliards aujourd’hui. Ce sont les produits laitiers et la viande de porc qui sont à l’origine de cette explosion des exportations. Les 3 produits laitiers les plus exportés sont le fromage, le lait infantile et le lait en poudre. Si l’UE ne concentre que 16 % de la production mondiale de lait, elle contribue au tiers de l’approvisionnement du marché mondial.

 

En porc, ce sont surtout l’Allemagne et l’Espagne qui ont récemment développé leurs productions. Ces 2 pays représentent 43 % de la production de l’UE27. Comme pour les produits laitiers, l’U27 ne concentre que20 % de la production mondiale de porc mais assure 45 % des échanges mondiaux avec 14 milliards d’euros d’exportations. La balance commerciale liée à la production de porc est à relativiser fortement car les régions qui exportent nourrissent principalement leurs animaux avec des aliments importés. Le coût de l’aliment qui représente 60 à 70 % du prix de revient de la production de viande porcine est donc, dans ce cas, à défalquer de la valeur des exportations. Nos 3 principaux clients en viande de porc sont la Chine, le Royaume-Uni et le Japon.

En Allemagne et en Espagne, ce sont des élevages « hors sol » dans tous les sens du terme. Les aliments sont largement importés du continent américain et d’Ukraine ou de Russie. Ces élevages destinés à l’export ont pour atouts un savoir-faire technique et des perturbations de la production, liées à des maladies épizootiques, dans les autres régions du globe. Si le prix des céréales et des protéines végétales augmente au sein de l’UE, ils perdront leur compétitivité et disparaitront. Les éleveurs bretons qui sont engagés dans des filières d’export vers la Chine sont très lourdement endettés. On imagine facilement que demain, avec des coûts de productio nbeaucoup plus bas, la Chine, la Thaïlande, le Brésil et l’Ukraine vont maitriser la production porcine et éjecter l’UE du marché mondial. Enfin, à quoi bon concentrer dans les zones portuaires de l’UE : la production porcine, le lisier et tous les problèmes environnementaux qui vont avec ?Ce sont ces cas minoritaires qui font que tous les agriculteurs se voienti nfliger des contraintes environnementales en retour de bâton. C’est enredressant les cours, par la maîtrise de l’offre et non en exportant que leséleveurs de porcs pourront assainir leur situation financière.

 

Le secteur avicole européen est légèrement excédentaire avec des exportations qui ont doublé en 20 ans pour atteindre 3 milliards d’euros. Sur cette période, c’est la Pologne qui a multiplié par 4 sa production de volailles, devenant le premier pays exportateur de l’UE. Ce sont de gros élevages industriels qui ont choisi de s’installer en Pologne pour bénéficier d’une main d’œuvre à bas prix et qui engendrent des distorsions de concurrence intra-européennes. La France, avec ses élevages familiaux et ses labels n’est plus dans la course et se retrouve envahie d’importations (50 % de la consommation de poulet). Les importations de volailles en provenance des pays tiers viennent  principalement du Brésil, de Thaïlande et d’Ukraine.

En viande bovine, le taux d’auto approvisionnement de l’UE varie de 102 à 104 %. Cet excédent artificiel est dû à un recul de la consommation à cause de la compétitivité des viandes blanches et aux attaques contre l’élevage bovin allaitant. Les importations avec des morceaux haut de gamme de type aloyau contribuent à affecter la valorisation de l’ensemble des carcasses. Les importations de viande bovine proviennent majoritairement d’Amérique latine (Brésil, Argentine, Uruguay). L’élevage français bovin a perdu1 million de têtes en 10 ans et ce déclin continuera avec le Mercosur !

 

En viande ovine, le déficit commercial de l’UE est de 500 à800 millions d’euros par an. Le principal fournisseur de l’UE est la Nouvelle Zélande. Le taux d’auto approvisionnement de l’UE en viande ovine est de seulement 87 %. En élevage ovin, il y a de la place pour installer des milliers de nouveaux bergers et recréer de la richesse dans des régions de déprise agricole et rurale.

 

Les productions végétales sont dominantes dans les échanges agroalimentaires de l’UE. Ce secteur a toujours été déficitaire et ce déficit s’accroit au fil des années ; il est passé de 11 à 25 milliards d’euros entre les années 2000 et 2022.

En 2022, l’UE est excédentaire en blé (8,8 milliards d’euros) mais déficitaire en maïs (-5,5 milliards d’euros). Le solde de toute la filière céréalière, farine et transformation compris, est excédentaire de 15milliards d’euros. Les seules préparations à base de céréales (pâtes, biscuits, pains) représentent un excédent de 10 milliards d’euros. Ce sont donc les industries alimentaires qui créent plus de valeur ajoutée exportable que les céréaliers.

Les protéines et huiles végétales constituent le plus grand échec de l’agriculture européenne. Une erreur a été commise lors du Dillon Round au GATT en 1962. La jeune CEE a cédé face aux exigences américaines sans en mesurer la portée. Le volet oléagineux de l’accord de Blair house en 1993,en imposant une surface maximale de culture de 5 128 000 hectares au sein de l’UE, était une véritable ingérence des Etats-Unis dans les affaires européennes. Cette limitation n’est plus en vigueur aujourd’hui. Le déficit annuel actuel est de l’ordre de 25-30 milliards d’euros. Il est composé de 30millions de tonnes de soja (graines et tourteaux) ; l’UE27 ne produit que25 % de ses besoins en protéines végétales.

Nous importons les 2/3 de notre consommation d’huiles végétales. Les importations d’oléagineux étaient composées, en 2022, de 5,7milliards d’euros d’huile de palme, de 4 milliards d’euros de graines de colza en provenance d’Australie, d’Ukraine et du Canada, de 1,5 milliard d’euros d’huile de tournesol en provenance très majoritairement d’Ukraine.

La seule huile dont l’UE soit excédentaire, c’est historiquement l’huile d’olive avec 3 milliards d’euros d’exportations. Ceci s’explique parce que l’huile d’olive est plus chère que les autres huiles alimentaires. Les industriels, à la recherche d’économies, utilisent de l’huile de palme. Ils préfèrent déforester et n’ont que peu d’intérêt pour la santé du consommateur car l’huile d’olive est de loin la plus saine ! Ce n’est pas normal que l’UE dégage sur les pays tiers, plus du tiers de sa production d’huile d’olive !  La PAC que nous proposons, en faisant remonter les prix des huiles de graines oléagineuses produites dans l’UE et en taxant les importations redonnera de la compétitivité à l’huile d’olive et sera donc profitable pour la santé des consommateurs et également pour l’agriculture méditerranéenne qui manque d’alternatives ! Dans le sud de la France, pour remplacer les vignes arrachées, l’oléiculture est une possibilité sérieuse de reconversion, sous condition de rentabilité.

 

La production européenne de fruits et légumes accuse un déficit de 9,2 milliards d'euros en 2022. Ce sont les fruits qui sont particulièrement déficitaires (- 14,9 milliard d’euros) malgré 4 espèces excédentaires (pomme, fraise, pêche et poire) pour un total de 1 milliard d’euros.

En légumes frais nous avons un léger excédent de 735millions d’euros. En fruits et légumes transformés nous avons un excédent plus important de 3,8 milliards d’euros en 2022.

 

 

Le plus important défi pour l’agriculture et l’alimentation au sein de l’UE : réduire le déficit en protéines végétales

 

 

La seule période où les protéines végétales ont connu un développement important a été la décennie des années 1980. Il y eut, ces années-là, entre 600 000 et 700 000 ha de pois en France, et le soja était cultivé jusqu’à Montargis. Les prix des récoltes étaient 4 à 5 fois plus élevés qu’aujourd’hui en monnaie constante. Dès 1991, en anticipation de la réforme de la PAC de 1992 et au volet oléagineux de l’accord de Blair House de 1993, le développement a été stoppé et les surfaces cultivées en oléagineux et protéagineux ont régressé.

 

Déjà l’accord du Dillon round au GATT en 1962 avait été préjudiciable au développement de ces productions d’autant plus nécessaire que les viandes blanches gagnaient les faveurs des européens au détriment des viandes rouges.

La dépendance aux importations de soja résulte de ces accords commerciaux. Le soja importé à bas prix a été également préjudiciable aux légumineuses fourragères. En 1959, il y avait 3 millions d’hectares de luzerne en France. Il n’en reste plus que 300 000 actuellement. Cette plante restaure très efficacement la structure des sols et n’a pas besoin d’engrais azoté.

 

Il est impossible de réussir un plan protéines sans protéger notre marché européen.

Le but de cette protection, c’est de faire remonter les cours des graines, huiles et tourteaux sur le marché européen pour redonner un intérêt à ces familles de cultures. 

 

Il existe plusieurs outils pour protéger notre marché :

 

  • Taxer à niveau variable les importations à bas prix,     pour obtenir sur les sites portuaires un prix d’objectif (dans l’esprit     des anciens prix de seuil). C’est simple et efficace !

Ensuite, pour filtrer et sélectionner ce que nous allons choisir d’importer :

  • Mettre en place une LMR (limite maximale de résidus de     pesticides) à 0,1 mg/kg en glyphosate sur les produits destinés à     l’alimentation animale, chose qui de manière surprenante, n’existe pas     aujourd’hui. Cette mesure permettra de contraindre fortement les     importations d’OGM « Roundup Ready » et de récoltes dessiquées     au glyphosate.
  • Refuser l’importation de produits qui ne correspondent     pas à notre modèle de production ou aux attentes sociétales.

Enfin, après s’être placés dans une configuration favorable :

  • Renégocier les accords commerciaux de libre-échange     pour redonner une légalité à la souveraineté de la politique agricole.

 

Ces différents moyens seront développés plus loin dans cette note.

 

Un vrai plan protéines doit avoir une dimension européenne

 

Les 7 précédents plans protéines français ont échoué parce qu’ils n’ont pas pris en considération cette donnée fondamentale. L’autonomie protéique de la France est absurde. Si l’Autriche recherchait également son autonomie, alors pourquoi certaines régions françaises - plus grandes que l’Autriche - ne s’y mettraient pas non plus ? Nous sommes dans un marché unique depuis presque 60 ans et notre politique agricole est commune.

 

Les lobbies des biocarburants ont tenté d’imposer leur vision dans le développement des protéines végétales. Ils profitent de ce besoin de production en protéines comme d’un argument supplémentaire en faveur de la production de biodiesel. Le plus important, ce sont les surfaces cultivées en colza et en tournesol. Peu importe que les huiles aillent dans l’alimentaire ou dans les biocarburants ; la quantité de sous-produits protéiques disponibles (tourteaux) reste la même.

 

Le plan protéines : un levier économique pour redresser toute l’agriculture européenne !

 

Un développement des protéines végétales n’a pas comme seul intérêt ou objectif d’améliorer l’autosuffisance en protéines. En rééquilibrant les productions, il permet de réduire les surfaces en céréales dont le blé qui est malheureusement devenu la culture par défaut en Europe.

Il suffirait de 4 millions d’hectares de plus de plantes protéagineuses, soja, pois et luzerne dans l’UE pour ne plus avoir d’excédent de blé à exporter en dégagement vers les pays tiers.

Les prix du marché intérieur des céréales remonteraient et les productions de blé, orge et maïs redeviendraient rémunératrices. Il faudra bien évidemment que la rémunération des cultures oléagineuses anticipe celle des céréales pour que l’intérêt économique de ces productions soit moteur et reste moteur. Sinon, leur développement sera impossible.

 

Revenir aux bases de l’agronomie

 

Aujourd’hui, les assolements sont principalement céréaliers, avec des rendements qui stagnent et un recours à la phytopharmacie qui ne diminue pas. L’introduction de légumineuses dans la rotation a bien d’autres avantages. C’est un très bon précédent qui permet :

  • de meilleurs rendements pour les céréales qui suivent avec de meilleurs taux de protéines,
  • de fabriquer et stocker de l’azote à moindre coût grâce aux nodosités,
  • de limiter les apports d’engrais azotés et la dépendance aux importations d’engrais. 
  • d’alterner les matières actives, de réduire les traitements, et par conséquent de mieux gérer le salissement  des parcelles, les maladies, les insectes avec une baisse non négligeable  du recours à la phytopharmacie.
  • la préservation des sols et de la biodiversité par l’allongement des rotations.

 

 

Filières et interprofessions : un pas en avant, deux pas en arrière…

 

Les coopératives agricoles n’ont jamais été motivées à développer la culture du soja. Cette plante n’a pas besoin d’engrais azoté, on peut utiliser des semences fermières. Ceci représente un manque à gagner pour l’agrofourniture. Coté aval des filières, le soja ne produit que 3 tonnes par hectare contre 7 pour le blé et 10 pour le maïs. Ces petits rendements ne font fonctionner ni les transports, ni les silos. Plus pervers encore, le rééquilibrage des cultures en faveur des oléoprotéagineux se ferait aux dépends des exportations de blé. Or les coopératives françaises ont bien souvent des parts dans les silos portuaires. C’est pour ces raisons qu’il existe un puissant lobbying des exportateurs de blé qui infiltre même les organisations agricoles afin d’imposer la « vocation exportatrice » en comparant les exportations françaises de céréales à celles des avions Airbus, sans ne jamais citer les chiffres européens ou encore aborder la question sous l’angle global des grains avec le déficit abyssal en huiles et protéines végétales.

 

Dans cet esprit, en France, les interprofessions Intercéréales et Terres-Univia tirent la couverture chacune de leur côté pour défendre leur plan protéine. Il est regrettable qu’elles ne travaillent pas conjointement et même fusionnent dans l’intérêt général car, au sein des filières, les opérateurs sont les mêmes.

 

Nous protéger pour améliorer notre indépendance alimentaire ne veut pas dire fermer les frontières

 

Dans l’UE, les surfaces cultivées en oléoprotéagineux représentent 18 - 19 % de la surface totale des grandes cultures. Ce chiffre est de 37 - 39 % aux Etats-Unis, 45 % en Ukraine ainsi que de 67 et 69 %respectivement en Argentine et au Brésil où la monoculture du soja est largement pratiquée avec même 3 récoltes en 2 ans. Nous constatons que les cultures d’oléoprotéagineux sont bien moins développées dans l’UE que chez nos concurrents et fournisseurs. Il en résulte une dépendance dangereuse pour notresécurité alimentaire en se fournissant auprès de pays qui ont des rotations trop courtes car il existe un risque sanitaire fort avec des maladies comme larouille qui peuvent décimer les cultures.

Notons que ce sont des pays riches (Chine, UE, Japon) qui sont les plus gros importateurs de soja, à l’opposé des pays importateurs de céréales qui sont majoritairement des pays pauvres. Un défaut d’approvisionnement sur le marché du soja se traduirait par une « flambée des prix » bien supérieure à ce que nous avons connu en céréales en 2007, 2010 et2021.

 

Pour toutes les raisons évoquées ci-dessus, - dont le rééquilibrage des surfaces avec les céréales - il est impératif de développer la production de protéines végétales au sein de l’Union européenne. Un véritable plan protéines doit avoir comme objectif d’accroitre les surfaces de cultures en oléoprotéagineux (soja, colza, tournesol…) de 4 millions d’hectares pour que ces productions représentent au moins 25 % des grandes cultures de l’UE. Malgré cela, nous resterions importateurs nets en protéines végétales. Les quantités importées devraient être contingentées dans le seul objectif de complémenter le déficit annuel de la production de l’UE.

 

Il existe une autre famille bien plus ancienne de plantes protéagineuses en Europe ; ce sont les légumineuses fourragères :luzerne, trèfles, lotier, sainfoin, vesce. Il semble qu’il n’y ait pas de statistique européenne sur les surfaces en légumineuses fourragères au sein de l’UE 27 ; ce qui montre que la DG Agriculture n’a pas mesuré pleinement l’ampleur du problème et les enjeux potentiels pour redresser l’agriculture. Nous savons que la surface de luzerne en France a été divisée par 10 passant de3 300 000 hectares en 1960 à 330 000 ha aujourd’hui. Nous savons que l’Espagne et l’Italie ont des surfaces en luzerne supérieures à celle de la France. La France représentant 22 % des surfaces agricoles de l’UE27, une augmentation des surfaces en légumineuses fourragères de 3millions d’hectares au sein de l’UE (soit 660 000 ha pour la France) nous semble être un objectif réaliste.

 

 

En termes de résilience, de dépendance extérieure, de vulnérabilité sanitaire, d’autosuffisance en aliments et en fertilisants, d’agronomie, de réductions de transports et de prospérité pour nos agriculteurs, ce rééquilibrage des productions s’impose.

 

Pour arriver à ces objectifs de développement de surfaces de cultures riches en protéines, il ne faut plus que les lobbies des sociétés d’import-export de grains et d’aliments du bétail puissent encore déstructurer l’agriculture européenne.

 

 

 

Notre scénario pour redresser l’agriculture européenne

 

Pour relever l’ensemble des prix agricoles, il faut commencer par améliorer notre taux d’auto-approvisionnement en huiles et protéines végétales

 

La première chose à réaliser est de faire remonter progressivement les prix des oléoprotéagineux pour que les cultures se développent aux dépends des céréales dont les volumes exportés chuteront et disparaitront progressivement. Il s’en suivra donc, également une remontée des cours des céréales au sein de l’UE. Des protections tarifaires variables devront être mises en place pour que les produits de dumping aux portes de l’UE ne puissent altérer ce redressement des prix agricoles européens. Le but sera d’atteindre un prix d’objectif sur le marché intérieur. Le prix des oléoprotéagineux devra remonter plus en proportion que celui des céréales pour que ce plan puisse réussir.

 

Les cours des aliments concentrés du bétail vont donc progresser ; il faudra que cette hausse soit plus que répercutée au niveau des viandes pour que les éleveurs de volailles, de porcs et de vaches laitières voient leur revenu progresser fortement et, qu’ils ne soient pas incités à arrêter ces productions pour se recentrer sur les seules productions végétales dont la rentabilité sera restaurée.

 

La viande bovine retrouvera de la compétitivité face aux viandes blanches (volailles et porc) dont toute l’alimentation fournissait un avantage comparatif à cause de son prix qui était déconnecté des coûts de production européens.

 

Nous proposons une augmentation annuelle de 20 % des prix agricoles et cela sur une période d’au moins 5 ans. Si cela peut choquer ;c’est pourtant le chemin inverse qui a été fait dans les années 1990-2000. Il ne s’agit que de corriger les erreurs et de redonner légitimement aux agriculteurs leur dignité. Parfois, de manière brutale et inattendue, les prix de certaines productions augmentent de 100 % sur une année. Les filières savent donc encaisser ces à-coups même quand ils ne sont pas prévus.

 

Malgré ce plan, nous ne serons jamais autonomes en protéines végétales en Europe. Nous devrons donc continuer à importer mais nous pourrons imposer des cahiers des charges avec nos exigences qualitatives, sociales et environnementales.

 

Nous devons mettre en place une LMR en glyphosate sur les produits destinés à l’alimentation animale. Alors que les pouvoirs publics et la société civile sont de plus en plus exigeants vis-à-vis des agriculteurs en matière de résidus de pesticides, il est anormal qu’à la fin de l’annexe 1 du règlement 396/2005, définissant les LMR dans tous les aliments, la catégorie« aliments pour animaux » soit vierge.

 

Ainsi, les services de l’Etat ne font jamais d’analyses sur les tourteaux ou les drêches. Cette aberration résulte probablement d’un très fort lobbying des géants du grain auprès de la Commission européenne.

 

Une étude de l’ONU de 2019, affirme que 25 % des pesticides utilisés en Ukraine sont illégaux. Le Brésil, sous Bolsonaro, a homologué des dizaines de nouvelles molécules. Jusqu’à maintenant, le libre-échange passait avant la santé publique et l’environnement dans les priorités de l’Europe! L’UE étant le marché le plus riche au monde, nos fournisseurs pourront se plier à cette nouvelle norme sanitaire comme ils ont pu le faire en développant très vite des filières de soja non OGM.

 

La PAC actuelle oblige les agriculteurs européens à cultiver au moins 3 espèces différentes sur leurs fermes. Dans l’Iowa ou l’Illinois il n’y a que 2 cultures : maïs (55 %) et soja (45 %). Nous importons donc du soja américain qui provient d’agriculteurs qui, s’ils étaient européens, seraient sanctionnés par la PAC. Pourquoi appliquer plus de contraintes à nos propres productions qu’aux importations ?

Coté déforestation, le Brésil et les multinationales du commerce intercontinental des grains et aliments du bétail refusent la mise en place de contraintes. De telles certifications sont douteuses et facilement contournables comme c’est probablement déjà le cas avec les importations d’huile de palme d’Indonésie.

 

Concernant l’effet de notre plan sur les huiles végétales, l’augmentation des prix des huiles des graines oléagineuses redonnera de la compétitivité à l’huile d’olive et au beurre, induisant une hausse de leur consommation. Ce sera une aménité positive qui favorisera la consommation de produits agricoles européens.

 

Pour ce qui est de l’estérification, la hausse des prix de l’huile fera stopper l’utilisation du colza dans la production de biodiesel. Nous ne voyons aucun inconvénient à ce que ces usines modifient leur sourcing en se tournant vers des huiles importées comme l’huile de palme. Ces huiles importées de piètre qualité doivent être utilisées en priorité dans nos moteurs et chassées de nos estomacs.

 

Nous avons déjà bien identifié que les groupes industriels et financiers intervenant dans le secteur des biocarburants seront les plus grands opposants à notre plan de redressement de l’agriculture européenne. Ces structures ont surfé sur un prix très bas des oléoprotéagineux pour développer leurs usines en Europe et particulièrement en France où les 2/3 de l’huile de colza produite est estérifiée pour finir dans des moteurs diesel, pendant que nos industries agroalimentaires cuisinent à l’huile de palme. Ces choix des années 1990 ne sont plus adaptés et sont une des causes de la situation agricole actuelle.

 

Si nous faisons déjà le point, sur nos premières propositions, nous voyons que notre scénario permettra de redresser les productions suivantes :

 

  • céréales,
  • oléoprotéagineux,
  • volailles,
  • porc,
  • viande bovine.

 

Indirectement, toutes les autres productions végétales dont les prix de marché se calent sur celui du blé vont voir leur rentabilité augmenter. Nous pouvons lister :

 

  • Cultures légumières sous contrat (haricot-vert, petit     pois, épinard…)
  • Cultures d’oignons, pomme de terre sous contrat,
  • Productions contractuelles de semences,
  • Cultures de diversification comme la fraise ou  l’asperge.

 

Les cultures maraichères (salade, choux…) verront leur cours se maintenir car si les prix baissaient, les agriculteurs diminueraient aussitôt leurs surfaces cultivées au profit des grandes cultures.

Nous aurons donc réinstallé un cadre qui permet à l’offre et à la demande de mieux fonctionner sur les marchés agricoles.

 

La production de lait de vache est une « industrie lourde » demandant un investissement dans un cheptel qui est en place pour de nombreuses années avec des génisses qui ne produisent qu’au bout de 2 ans. C’est aussi un sacerdote car produire du lait oblige à travailler tous les jours de la semaine et à n’avoir que très peu de jours de congés. C’est une production pour laquelle la transmission des savoirs est très importante. On est fils et petit-fils d’éleveur laitier et quand on arrête l’élevage, c’est définitif, sans retour possible. Les débouchés du lait sont multiples et sa valorisation est également très différente que l’on produise du Comté ou que l’on soit sous contrat avec de grands groupes comme Lactalis ou SODIAAL.

Bon nombre de laitiers souffrent de prix trop bas à la production et la revalorisation du lait est leur première revendication.

Une organisation européenne de producteurs laitiers, l'European Milk Board (EMB) propose u Programme de Responsabilisation face au Marché (PRM), une initiative visant à réguler la production laitière en Europe pour assurer des prix rémunérateurs aux producteurs.

Ce programme est conçu pour être appliqué lorsque le marché du lait est menacé de déséquilibre, en ajustant la production en fonction de la demande.

En période de surproduction, le PRM encourage les producteurs à réduire leur volume de lait en échange d'une aide financière, tandis que ceux qui augmenteraient leur production peuvent être soumis à des pénalités. Ce mécanisme vise, en adaptant la production à la demande, à éviter les crises, à la stabilité du marché laitier, garantissant des prix stables et équitables pour les producteurs laitiers.

Le PRM de l'EMB est donc un outil de gestion du marché laitier européen, conçu pour prévenir les déséquilibres en ajustant la production aux fluctuations de la demande, assurant ainsi la viabilité économique des exploitations laitières.

Les industries laitières implantées au sein de l’UE subissent des coûts de production, des normes et des contraintes qui sont européens. Il est donc anormal que, seule, la matière première qu’elles utilisent soit au cours mondial alors qu’elle est produite par des éleveurs dont toutes les charges sont également à un niveau européen. Pour la production de lait, il serait donc justifié de conserver un système d’aides financières dont la finalité ne serait pas une compensation de revenu mais une régulation évolutive de la production en fonction de l’état du marché. Les industries laitières, si elles souhaitent conserver des parts de marchés à l’export sur les pays tiers, seraient donc contraintes à rechercher des facteurs d’amélioration de leur compétitivité autrement qu’en « mal payant le lait ».

 

En fruits et légumes certains problèmes sont encore plus prégnants que dans les autres productions : le manque de solutions en protection sanitaire, le manque demain d’œuvre qui oblige à laisser des récoltes dans les champs, le coût de l’énergie sans oublier les importations à bas prix. Faire remonter les prix et donc la rentabilité de ces productions est la clé pour résoudre tous ces problèmes. Il est essentiel de taxer et de réglementer l’introduction de chaque espèce et type de fruits et légumes. Les marchés sont déstabilisés par des importations de pommes du Chili et d’Afrique du Sud, de kiwis néozélandais…

En tomates, les producteurs français ont été contraints de se replier vers la tomate cerise, un créneau qui était à l’abris des importations mais maintenant de très grosses sociétés marocaines inondent le marché de la tomate cerise toute l’année. Il est important de définir des quotas et des créneaux saisonniers d’importation pour ne pas perturber la production européenne.

Cette saisonnalité de libre-circulation doit également exister au niveau européen pour protéger les bassins historiques de production de fruits et légumes dans chaque état-membre. Pour la France, citons par exemple la tomate de Marmande, les fraises du Périgord, la cerise des coteaux du Ventoux…

Nos productions françaises régressent considérablement en fruits et légumes. Inversement, la progression des exportations des Pays de l’Est est constante. 

Nous devons également protéger et favoriser le développement des productions fruitières comme la banane et l’ananas dans les territoires ultra-marins des Etats de l’UE qui sont confrontés à la concurrence de pays voisins à faible coût.

 

 

Réduire les distorsions de concurrence intra européennes  et définir un modèle agricole européen pour orienter l’agriculture de l’ensemble des états-membres dans la même direction

 

Le marché commun, au début des années 1960, était un beau projet. L’objectif était que les agricultures, différentes entre chacun des 6pays fondateurs de la CEE, se complètent. Avec des niveaux de coûts de production semblables il n’y avait pas de problème. Chaque pays avait sa monnaie et des montants compensatoires monétaires (MCM) permettaient de réduire les distorsions de concurrence entre états-membres lors des variations de parité de monnaies comme suite à une dévaluation dans un des pays.

 

Quand les 10 PECO (Pays d'Europe centrale et orientale)sont entrés dans l'Union européenne en 2004, aucune mesure compensatoire n’a été mise en place pour protéger les anciens Etats-membres des fluctuations monétaires et surtout de l’effet concurrentiel des coûts économiques et sociaux qui étaient bien plus bas dans les pays entrants. Cet élargissement a été brutal pour certains secteurs économiques. Au fil des années, des pays comme la Pologne se sont modernisés d’une manière incroyable mais le niveau des salaires des normes et de la fiscalité bien plus bas qu’en France. Ceci leur permet de bénéficier d’une insolente compétitivité.

 

Les grandes productions végétales sont les moins concernées. On peut tout de même citer le développement de cultures de plantes aromatiques et à parfum en Bulgarie.

 

Ce sont dans les productions animales de type industriel que l’on observe des développements non encadrés d’élevages qui perturbent le marché allant jusqu’à remettre en cause la viabilité des modèles familiaux basés sur des produits de qualité dans nos bassins historiques de production .Nous avons déjà évoqué les productions de porcs en Allemagne et Espagne. Aujourd’hui le problème vient beaucoup plus de la Pologne pour le poulet, les œufs et maintenant le bœuf. Il existe en Croatie des projets de créations de poulaillers gigantesques.

 

En France, nous tentons vainement, via les SAFER et les CDOA, de limiter l’agrandissement des propriétés foncières et leur exploitation. Dans la majorité des Etats membres il n’y a pas d’entrave au développement de l’entreprise agricole. En l’absence d’une vraie Politique Agricole Commune, qui devrait traiter ce sujet au lieu de se limiter à la distribution de primes, nous assistons à des développements de modèles de production industriels et hors sols dans les régions où les investisseurs bénéficient d’avantages comparatifs.

 

Afin d’enrayer ces abus, nous proposons de lier au sol ces élevages de 2 manières :

 

  • Par l’alimentation des animaux : un pourcentage     évolutif de l’aliment consommé dans l’élevage devra être produit     localement et/ou dans la même structure juridique.
  • L’élevage devra bénéficier localement de la surface     agricole nécessaire à l’épandage des effluents d’élevages produits sur     l’entité juridique.

 

Ces contraintes ont été appliquées et acceptées relativement facilement en agriculture biologique (Règlement UE 2018/848). Il s’agit d’établir un équilibre entre la répartition de la production animale sur le territoire, la capacité des sols à valoriser la fertilisation organique, tout en favorisant l’autonomie alimentaire des élevages par la création d’un débouché local rémunérateur pour les productions végétales potentiellement utilisables en alimentation animale.

 

C’est l’absence d’une réelle politique agricole depuis 40ans au sein de l’UE qui a permis ces dérives. Seule la France a voulu prendre des mesures pour encadrer le développement de son agriculture mais elle s’est tirée une balle dans le pied et sa compétitivité agricole a fortement décroché. Nous sommes dans un marché européen ouvert depuis 60 ans et même mondialisé depuis 30 ans. Si nous voulons être souverains sur le développement de notre agriculture pour assurer notre sécurité alimentaire, il faut que nous soyons pleinement souverains en matière de politique agricole sinon cela conduit à« l’agricide » que nous connaissons actuellement. Ce ne sont ni des lois EGAlim, ni des LOA françaises qui ne garantiront du revenu et donc leur survie à nos agriculteurs.

 

La France qui reste le premier pays agricole européen se doit de prendre le leadership en matière de propositions pour un modèle d’une agriculture européenne à visage humain répondant à tous les défis qui se présentent face à elle. C’est le message que nous devons envoyer à Bruxelles au lieu de « chipoter » sur la répartition des aides.

 

La nature ayant horreur du vide, l’absence de synergie qu’aurait induit une politique agricole européenne forte est, en partie, à l’origine de l’apparition de ces distorsions de concurrence intra-européenne. Il est bien connu que, dans un groupe, quand le chef ne fixe plus les lignes directrices, les déchirements entre les membres apparaissent.

 

Si nous avions une vraie politique agricole européenne avec des modèles agricoles et alimentaires bien cadrés, les questions d’OGM, d’hormones, de LMR sur les produits importés et de l’entrée de l’Ukraine au sein de l’UE ne se poseraient même plus.

 

 

 Il est donc possible de redresser l’agriculture européenne en améliorant les prix à la production. Pour cela il est nécessaire de définir un cap cohérent et un ensemble de mesures à respecter dans leur intégrité. Il faut prendre conscience que nous sommes au chevet d’une agriculture très malade et que nous devons en priorité la protéger de ceux tous ceux qui par leurs actes risquent de lui asséner le coup létal. Comme pour un grand malade, le protocole que nous proposons doit être respecté dans son intégralité. Il n’y a pas de compromis possible au profit de lobbies qui n’y trouveront plus leur compte. C’est l’intérêt général, le sens commun, qui doit primer et non les« primes » de la Commission européenne. Derrière notre agriculture, il y a des familles de paysans, des modèles d’alimentation, une ruralité, les racines de notre société et donc l’ancrage de notre civilisation. C’est tout cela que nous avons l’ambition de défendre.

 

 

 

 

 

 

Il est indispensable de construire une vraie politique agricole pour les raisons suivantes :

 

-  Les primes PAC en diminution ne peuvent pas assurer un revenu aux agriculteurs et cet assistanat dévalorisant a déjà trop duré.

- Réduire les contraintes et taxes absurdes pour les agriculteurs. Il est toutefois important que les agriculteurs continuent à contribuer au financement de la société sans être marginalisés.

- Les distorsions de concurrences entre états-membres qui devaient se réduire avec l’augmentation du niveau de vie, s’aggravent par l’absence de politique agricole et de règles internes communes.

- Restructurer l’agriculture en éliminant 50 % des paysans ne sert à rien en termes de compétitivité car cela ferait passer de 60à 120 ha les surfaces moyennes en France et de 17 à 34 ha la moyenne européenne, face à des pays neufs où les fermes font des milliers d’hectares.

- Le seul paramètre sur lequel il est donc impératif d’agir, c’est le prix de la matière première agricole qui, pour les grandes productions agricoles, a été divisé par 2 à 3 en 30 ans avec l’entrée de l’agriculture au sein de l’OMC.

 

Nous avons rappelé que la production agricole européenne est globalement déficitaire alors que depuis 40 ans on nous fait croire que les excédents sont généralisés.

 

Ce déficit est une chance car il peut nous permettre en cascade :

 

  • de rééquilibrer l’ensemble de nos productions agricoles en fonction des besoins du marché européen pour produire ce que la     population, de l’ensemble économique le plus riche au monde, consomme,
  • de ne plus avoir besoin de dégager des volumes sur des marchés d’exportation non rémunérateurs pour nos agriculteurs,
  • de fermer nos frontières aux importations, dès lors que l’UE n’exporte plus ces mêmes productions,
  • après cette régulation de nos productions agricoles européennes, de retrouver notre liberté d’action auprès de l’OMC, de     manière à pouvoir sortir l’agriculture, des accords commerciaux,
  • de mettre en place des droits de douane, l’attitude du Président Trump aux affaires créant une conjoncture favorable,
  • d’améliorer la qualité moyenne des produits consommés en réduisant les volumes importés,

 

Les nombreux bénéfices d’une bonne politique agricole commune et souveraine

 

Avec cette PAC refondée, les prix agricoles vont se redresser. Ceci va permettre d’améliorer sérieusement la condition sociale des agriculteurs. Ils ne se fatigueront plus avec des fermes ou des troupeaux démesurés dans une course effrénée à l’obtention du revenu minimal. La fuite en avant vers la productivité et l’agrandissement sera stoppée.

Si les agriculteurs vivent très correctement du fruit de leur travail avec des rendements moyens, ils n’auront plus besoin d’aller chercher les derniers quintaux ou les derniers litres de lait obtenus au moyen d’intrants contestés. Ce sera donc très bénéfique à la fois pour l’environnement et la qualité des aliments.

Au slogan « pas d’interdictions sans solutions »,nous répondons que la seule solution n’est pas le maintien des molécules phytopharmaceutiques. Une autre solution, bien meilleure, réside dans l’augmentation des prix agricoles.

Les marges confortées permettront de mieux subir les aléas climatiques et règleront la question des assurances récoltes ou climatiques coûteuses et trop mal adaptées.

Avec un meilleur revenu les agriculteurs pourront embaucher afin de ne plus être seuls sur leurs fermes. Cela leur permettra de ne plus travailler 54 heures par semaine, de prendre goût aux congés, de se marier plus facilement et donc de procréer. Leurs enfants ne chercheront plus à fuir le métier et l’agriculture sauverait ainsi ses savoir-faire.

 

Comment agir pour faire remonter simultanément l’ensemble des prix agricoles ?

 

Toutes les productions agricoles sont interconnectées entre elles : il ne faut pas créer de distorsions lors de ce redressement de l’agriculture afin de ne pas engendrer de nouvelles crises sur certains marchés. Cette réalité importante et méconnue de l’équilibre entre les productions agricoles n’a pas été abordée dans les notes précédentes. Son développement trouve sa place dans cette neuvième note pour la compréhension des propositions de redressement de l’agriculture.

 

L’équilibre entre les productions agricoles

 

L’agriculture répond aux sciences du vivant. Comme dans un corps humain où tous les organes sont liés entre eux, nos productions agricoles sont également connectées. En Europe, la culture qui est, ce que le diapasonest à l’orchestre, c’est le blé. Le prix de toutes les autres productions s’accorde sur celui du blé. Le blé est la culture la plus commune au sein de l’UE, on peut même dire la culture par défaut. Les prix des cultures contractuelles de légumes pour l’industrie ou de production de semences ne sont pas calculés par rapport à leurs coûts de productions mais par rapport aux cours du blé : l’industriel va donner à l’agriculteur un prix qui lui permettra d’obtenir une rémunération tout juste supérieure à ce qu’il aurait obtenu s’il avait semé du blé. De même, un agriculteur va cultiver des pommes de terre ou des oignons simplement si cela améliore un peu son revenu. Il se diversifie vers les marchés, généralement réservés aux petites exploitations, en cultivant des asperges ou des fraises pour également améliorer son revenu. Si les cours du blé remontent, il n’a plus besoin d’aller concurrencer d’autres agriculteurs spécialisés et peut vivre du fruit de son travail avec des productions de base.

Le blé est utilisé dans l’alimentation humaine et animale. Les prix de l’orge et du maïs sont influencés par ceux du blé car ces 3céréales se substituent dans la ration des animaux. Nos animaux d’élevages consomment également des protéines végétales pour lesquelles l’UE n’a pas protégé son marché. Nos agriculteurs n’en produisent donc que le quart des besoins du marché européen. Les protéines végétales sont importées au cours mondial sous forme de soja. Depuis que l’UE n’a plus protégé son marché des céréales, les prix européens ont fortement baissé. Les éleveurs de porcs et de volailles alimentent donc leurs animaux avec des aliments à très bas prix :protéines végétales importées et céréales subventionnées par la PAC. Nous avons ainsi créé une distorsion de concurrence entre les animaux nourris avec des aliments concentrés et les vaches allaitantes (bovins viande), nourris à l’herbe de nos prairies. C’est ce qui explique, en partie, une évolution de la consommation des viandes, avec une diminution de la viande de bœuf et une augmentation de la consommation de porc et de poulet. La restauration collective est particulièrement sensible à ces variations de prix. Les éleveurs de charolaises ou de limousines sont les agriculteurs qui ont les plus faibles revenus et les plus grandes fermes ! Là où ils le peuvent, ils cherchent à arrêter l’élevage, à labourer leurs prairies pour y semer, par défaut, du blé. Or nous sommes déjà excédentaires en blé.

 

Nous venons de démontrer :

 

1 - que des cours du blé, conjoncturellement bas, tirent à la baisse les prix de toutes les autres productions agricoles,

2 - qu’une baisse du prix des céréales entraine, par effet domino, une augmentation de la production de blé !

 

C’est un cercle vicieux ; l’agriculture ne répond pas à une logique industrielle et commerciale.

 

Ainsi, les artisans d’une vocation exportatrice en céréales– dans une UE globalement très déficitaire en grains – en approvisionnant des marchés au cours mondial dans les pays tiers, imposent aux agriculteurs européens des prix bas en céréales qui tirent les cours de toutes les autres productions agricoles à la baisse.

 

On ne peut être « en même temps » pour les exportations françaises de céréales vers les pays tiers et pour que tous les agriculteurs vivent dignement de leur travail grâce à des prix rémunérateurs. C’est antagoniste.

Si l’on veut que cet équilibre naturel redevienne vertueux, il faut évidemment que les importations n’arrivent plus comme un chien dans un jeu de quilles.

 

 

Comment limiter les importations actuelles non utiles et préjudiciables pour le revenu agricole ?

 

Les clauses miroirs sont contractuelles, résultant de l’accord des 2 parties. S’il s’agit de dénoncer des contrats ou de prendre des décisions unilatérales, elles ne sont donc pas le bon outil.

Les mesures miroirs sont incluses dans la réglementation européenne, elles ont été mises en œuvre pour l’utilisation des antibiotiques sur la viande bovine. La mise en place de telles mesures doit être justifié scientifiquement. Stopper l’importation d’aliments traités avec des pesticides interdits, permet de protéger les consommateurs. Mais comment prouver que des importations nuisent au revenu de nos agriculteurs ? Nous ne sommes plus dans le domaine scientifique mais économique et social voire culturel ?

Par exemple, les 5 molécules de la famille des néonicotinoïdes sont toutes autorisées dans les pays d’Amérique latine et employées sur les cultures de riz et de canne à sucre. De nombreuses autres molécules, interdites au sein de l’UE, sont autorisées au Brésil. Nous pourrions déjà nous protéger du sucre brésilien pour raison sanitaire.

La Colombie est un des principaux producteurs de sucre d’Amérique latine et exporte entre autres vers l’Union européenne. Les sucreries sont des usines qui cultivent des milliers d’hectares de terres louées aux anciens agriculteurs propriétaires qui n’ont donc plus d’activité agricole. Les sucreries sont situées en pleine campagne mais elles ont construit des villages privés avec logement des employés, écoles, médecins, magasins, le tout entouré de hauts grillages et sécurisé par des gardiens armés. Un état dans l’état…

Voulons-nous pousser nos coopératives à développer ce modèle en Europe ? En France, la surface moyenne cultivée en betterave à sucre est de 16,5 hectares par planteur. Nous ne pouvons donc pas rivaliser avec lesmodè les économiques et sociaux de production de sucre en Amérique latine. Pour cela, nous devons de manière unilatérale, au prétexte que nous ne voulons pas importer ce modèle de production, pouvoir stopper les produits qui peuvent s’avérer « toxiques » pour nos agriculteurs. Plutôt que d’importer du sucre de canne d’Amérique Latine, nous devons mieux valoriser cette production de nos départements d’outre-mer qui ne sont pas compétitifs face aux pays à faibles coûts. Rien qu’à la Réunion, la filière sucre représente 18 000emplois directs et indirects.

Taxer les importations de sucr e ou de tourteau de soja peut-il porter atteinte au développement économique ? Non, nous aurons toujours du sucre à mettre dans notre café ; il sera français, avec unemeilleure traçabilité et produit plus sainement. Actuellement, avec la suppression des quotas et la baisse du prix du sucre à la consommation, l’Etat a mis en place une « taxe soda » dont l’objectif est de diminuer la consommation de sucre. Cette taxe lui a rapporté 443 M € en 2023. Pourquoi taxer la consommation alors que l’on ne taxe pas les importations à bas prix ? Autant taxer à la source.

Quel consommateur se plaindrait d’une taxation du tourteau de soja ? Personne n’en mange directement ! Le coût de l’aliment de l’éleveur de volaille de porc et de vaches laitières augmentera mais il devra être répercuté sur le prix de vente à la production afin de ne pas léser les agriculteurs. Il y a de nombreuses économies de charges dont des taxes, à faire sur l’aval de la filière pour garantir un prix bas pour le consommateur. Si la raison d’être des taxes est la contribution qu’elles peuvent apporter aux budgets nationaux ou européen, alors, il est plus logique de taxer les importations que nos productions.

Dans les années 1980, alors que prix des céréales était 2 à3 fois plus cher qu’aujourd’hui, les viandes étaient à un prix plus abordable pour les catégories sociales défavorisées. Nous voyons encore ici que le problème du pouvoir d’achat est à rechercher ailleurs que dans les fermes.

Mettre des barrières tarifaires sur les produits du commerce international revient simplement à taxer des biens matériels. Quand ce matérialisme de l’Occident, dénoncé par Soljenitsyne en 1978 et aujourd’hui par J.D. Vance, menace la chute spirituelle de notre civilisation, il n’y a pas à hésiter. C’est le cas des importations de produits agricoles, à un prix inférieur au coût de production local qui mettent en péril une profession, un métier, une culture. Avec l’exception culturelle nous avons « taxé pour libérer » nos créations musicales et audiovisuelles d’une concurrence médiocre. Nous sommes issus d’une civilisation de paysans. Les mots agriculture et culture ont la même origine latine. Il n’y a pas de honte à nous protéger ; la taxe reste une arme pacifique et ce n’est pas une interdiction. Le consommateur qui veut se faire plaisir en achetant une bouteille de vin Chilien est prêt à payer quelques euros de taxes au motif que son geste d’achat n’a pas contribué au développement de la filière viticole française. La taxation est un outil de remise à niveau des prix comme les écluses du canal qui régulent la hauteur d’eau pour assurer le trafic. On pourrait cite régalement les divisions et les classes d’âge au football sans lesquelles la compétition n’aurait aucun attrait.

 

Quelques données sur le commerce agroalimentaire

 

Les données citées ici proviennent principalement du document « La place de l’Union européenne dans le commerce international de produits agricoles et alimentaires » présenté en décembre 2023 par Vincent Chatelier de l’INRAE et Thierry Pouch de l’APCA.

Au niveau de la répartition, en valeur, du commerce mondial des produits agricoles et alimentaires, les productions végétales représentent4 fois les productions animales. Boissons et poissons étant exclus de ce calcul.

Au niveau de l’UE27, les importations de productions végétales représentent (en valeur) 9 fois celles des productions animales. Le premier poste étant celui des « oléagineux, protéagineux et huiles »qui compte pour 20,9 % des importations européennes, suivit des fruits et légumes (16,6 %).

En 2022, le solde de la balance commerciale agroalimentaire de l’UE était de 30 milliards d’euros. Sans prise en compte des boissons, ce solde aurait été proche de zéro car l’excédent commercial pour les boissons était en 2022 de 29,5 milliards d’euros. A noter que le pays tiers avec le quel le solde a été le plus élevé est le Royaume-Uni : 30,1 milliards d’euros en 2022. Malgré le Brexit, le Royaume-Uni reste le premier client de l’UE pour l’agroalimentaire. Si le Royaume-Uni était resté dans l’UE, le solde de la balance commerciale agroalimentaire de l’UE28 aurait donc été nul.

Le second pays avec lequel l’UE27 a un solde très positif, ce sont les Etats-Unis avec 16,8 milliards d’euros en 2022. Nous comprenons que ce chiffre a de quoi agacer l’administration Trump qui souhaite relancer la production américaine dans tous les secteurs de l’économie. Nous importons des Etats-Unis du soja, du blé de force, du Bourbon et des oranges (principalement en Allemagne). Et nous exportons vers les Etats-Unis presque uniquement du vin et du fromage d’appellation.

Nous ne nourrissons pas de Cognac, de Chablis et de crottin de Chavignol. Les vins, spiritueux et fromages devraient être exclus de l’alimentaire et intégrés dans le luxe avec les parfums, la maroquinerie et la haute-couture. Louis Vuitton n’a-t-il pas déjà depuis longtemps intégré Moët et Hennessy ?  Les seuls parfums et cosmétiques représentent un excédent commercial de 20,1 milliards d’euros, rien que pour la France. Les produits agricoles de base sont loin derrière et les partisans de leur vocation exportatrice mettent nos paysans dans la situation de « la Grenouille qui se veut faire aussi grosse que le Bœuf ».

 

Nous avons vu que les produits animaux étaient 4 fois moins échangés que les produits végétaux au niveau du commerce international. Mais, au sein de l’UE les productions animales contribuent à un fort excédent commercial qui est passé d’environ 10 milliards d’euros en l’an 2000 à 50milliards aujourd’hui. Ce sont les produits laitiers et la viande de porc qui sont à l’origine de cette explosion des exportations. Les 3 produits laitiers les plus exportés sont le fromage, le lait infantile et le lait en poudre. Si l’UE ne concentre que 16 % de la production mondiale de lait, elle contribue au tiers de l’approvisionnement du marché mondial.

 

En porc, ce sont surtout l’Allemagne et l’Espagne qui ont récemment développé leurs productions. Ces 2 pays représentent 43 % de la production de l’UE27. Comme pour les produits laitiers, l’U27 ne concentre que20 % de la production mondiale de porc mais assure 45 % des échanges mondiaux avec 14 milliards d’euros d’exportations. La balance commerciale liée à la production de porc est à relativiser fortement car les régions qui exportent nourrissent principalement leurs animaux avec des aliments importés. Le coût de l’aliment qui représente 60 à 70 % du prix de revient de la production de viande porcine est donc, dans ce cas, à défalquer de la valeur des exportations. Nos 3 principaux clients en viande de porc sont la Chine, le Royaume-Uni et le Japon.

En Allemagne et en Espagne, ce sont des élevages « hors sol » dans tous les sens du terme. Les aliments sont largement importés du continent américain et d’Ukraine ou de Russie. Ces élevages destinés à l’export ont pour atouts un savoir-faire technique et des perturbations de la production, liées à des maladies épizootiques, dans les autres régions du globe. Si le prix des céréales et des protéines végétales augmente au sein de l’UE, ils perdront leur compétitivité et disparaitront. Les éleveurs bretons qui sont engagés dans des filières d’export vers la Chine sont très lourdement endettés. On imagine facilement que demain, avec des coûts de productio nbeaucoup plus bas, la Chine, la Thaïlande, le Brésil et l’Ukraine vont maitriser la production porcine et éjecter l’UE du marché mondial. Enfin, à quoi bon concentrer dans les zones portuaires de l’UE : la production porcine, le lisier et tous les problèmes environnementaux qui vont avec ?Ce sont ces cas minoritaires qui font que tous les agriculteurs se voienti nfliger des contraintes environnementales en retour de bâton. C’est enredressant les cours, par la maîtrise de l’offre et non en exportant que leséleveurs de porcs pourront assainir leur situation financière.

 

Le secteur avicole européen est légèrement excédentaire avec des exportations qui ont doublé en 20 ans pour atteindre 3 milliards d’euros. Sur cette période, c’est la Pologne qui a multiplié par 4 sa production de volailles, devenant le premier pays exportateur de l’UE. Ce sont de gros élevages industriels qui ont choisi de s’installer en Pologne pour bénéficier d’une main d’œuvre à bas prix et qui engendrent des distorsions de concurrence intra-européennes. La France, avec ses élevages familiaux et ses labels n’est plus dans la course et se retrouve envahie d’importations (50 % de la consommation de poulet). Les importations de volailles en provenance des pays tiers viennent  principalement du Brésil, de Thaïlande et d’Ukraine.

En viande bovine, le taux d’auto approvisionnement de l’UE varie de 102 à 104 %. Cet excédent artificiel est dû à un recul de la consommation à cause de la compétitivité des viandes blanches et aux attaques contre l’élevage bovin allaitant. Les importations avec des morceaux haut de gamme de type aloyau contribuent à affecter la valorisation de l’ensemble des carcasses. Les importations de viande bovine proviennent majoritairement d’Amérique latine (Brésil, Argentine, Uruguay). L’élevage français bovin a perdu1 million de têtes en 10 ans et ce déclin continuera avec le Mercosur !

 

En viande ovine, le déficit commercial de l’UE est de 500 à800 millions d’euros par an. Le principal fournisseur de l’UE est la Nouvelle Zélande. Le taux d’auto approvisionnement de l’UE en viande ovine est de seulement 87 %. En élevage ovin, il y a de la place pour installer des milliers de nouveaux bergers et recréer de la richesse dans des régions de déprise agricole et rurale.

 

Les productions végétales sont dominantes dans les échanges agroalimentaires de l’UE. Ce secteur a toujours été déficitaire et ce déficit s’accroit au fil des années ; il est passé de 11 à 25 milliards d’euros entre les années 2000 et 2022.

En 2022, l’UE est excédentaire en blé (8,8 milliards d’euros) mais déficitaire en maïs (-5,5 milliards d’euros). Le solde de toute la filière céréalière, farine et transformation compris, est excédentaire de 15milliards d’euros. Les seules préparations à base de céréales (pâtes, biscuits, pains) représentent un excédent de 10 milliards d’euros. Ce sont donc les industries alimentaires qui créent plus de valeur ajoutée exportable que les céréaliers.

Les protéines et huiles végétales constituent le plus grand échec de l’agriculture européenne. Une erreur a été commise lors du Dillon Round au GATT en 1962. La jeune CEE a cédé face aux exigences américaines sans en mesurer la portée. Le volet oléagineux de l’accord de Blair house en 1993,en imposant une surface maximale de culture de 5 128 000 hectares au sein de l’UE, était une véritable ingérence des Etats-Unis dans les affaires européennes. Cette limitation n’est plus en vigueur aujourd’hui. Le déficit annuel actuel est de l’ordre de 25-30 milliards d’euros. Il est composé de 30millions de tonnes de soja (graines et tourteaux) ; l’UE27 ne produit que25 % de ses besoins en protéines végétales.

Nous importons les 2/3 de notre consommation d’huiles végétales. Les importations d’oléagineux étaient composées, en 2022, de 5,7milliards d’euros d’huile de palme, de 4 milliards d’euros de graines de colza en provenance d’Australie, d’Ukraine et du Canada, de 1,5 milliard d’euros d’huile de tournesol en provenance très majoritairement d’Ukraine.

La seule huile dont l’UE soit excédentaire, c’est historiquement l’huile d’olive avec 3 milliards d’euros d’exportations. Ceci s’explique parce que l’huile d’olive est plus chère que les autres huiles alimentaires. Les industriels, à la recherche d’économies, utilisent de l’huile de palme. Ils préfèrent déforester et n’ont que peu d’intérêt pour la santé du consommateur car l’huile d’olive est de loin la plus saine ! Ce n’est pas normal que l’UE dégage sur les pays tiers, plus du tiers de sa production d’huile d’olive !  La PAC que nous proposons, en faisant remonter les prix des huiles de graines oléagineuses produites dans l’UE et en taxant les importations redonnera de la compétitivité à l’huile d’olive et sera donc profitable pour la santé des consommateurs et également pour l’agriculture méditerranéenne qui manque d’alternatives ! Dans le sud de la France, pour remplacer les vignes arrachées, l’oléiculture est une possibilité sérieuse de reconversion, sous condition de rentabilité.

 

La production européenne de fruits et légumes accuse un déficit de 9,2 milliards d'euros en 2022. Ce sont les fruits qui sont particulièrement déficitaires (- 14,9 milliard d’euros) malgré 4 espèces excédentaires (pomme, fraise, pêche et poire) pour un total de 1 milliard d’euros.

En légumes frais nous avons un léger excédent de 735millions d’euros. En fruits et légumes transformés nous avons un excédent plus important de 3,8 milliards d’euros en 2022.

 

 

Le plus important défi pour l’agriculture et l’alimentation au sein de l’UE : réduire le déficit en protéines végétales

 

 

La seule période où les protéines végétales ont connu un développement important a été la décennie des années 1980. Il y eut, ces années-là, entre 600 000 et 700 000 ha de pois en France, et le soja était cultivé jusqu’à Montargis. Les prix des récoltes étaient 4 à 5 fois plus élevés qu’aujourd’hui en monnaie constante. Dès 1991, en anticipation de la réforme de la PAC de 1992 et au volet oléagineux de l’accord de Blair House de 1993, le développement a été stoppé et les surfaces cultivées en oléagineux et protéagineux ont régressé.

 

Déjà l’accord du Dillon round au GATT en 1962 avait été préjudiciable au développement de ces productions d’autant plus nécessaire que les viandes blanches gagnaient les faveurs des européens au détriment des viandes rouges.

La dépendance aux importations de soja résulte de ces accords commerciaux. Le soja importé à bas prix a été également préjudiciable aux légumineuses fourragères. En 1959, il y avait 3 millions d’hectares de luzerne en France. Il n’en reste plus que 300 000 actuellement. Cette plante restaure très efficacement la structure des sols et n’a pas besoin d’engrais azoté.

 

Il est impossible de réussir un plan protéines sans protéger notre marché européen.

Le but de cette protection, c’est de faire remonter les cours des graines, huiles et tourteaux sur le marché européen pour redonner un intérêt à ces familles de cultures. 

 

Il existe plusieurs outils pour protéger notre marché :

 

  • Taxer à niveau variable les importations à bas prix,     pour obtenir sur les sites portuaires un prix d’objectif (dans l’esprit     des anciens prix de seuil). C’est simple et efficace !

Ensuite, pour filtrer et sélectionner ce que nous allons choisir d’importer :

  • Mettre en place une LMR (limite maximale de résidus de     pesticides) à 0,1 mg/kg en glyphosate sur les produits destinés à     l’alimentation animale, chose qui de manière surprenante, n’existe pas     aujourd’hui. Cette mesure permettra de contraindre fortement les     importations d’OGM « Roundup Ready » et de récoltes dessiquées     au glyphosate.
  • Refuser l’importation de produits qui ne correspondent     pas à notre modèle de production ou aux attentes sociétales.

Enfin, après s’être placés dans une configuration favorable :

  • Renégocier les accords commerciaux de libre-échange     pour redonner une légalité à la souveraineté de la politique agricole.

 

Ces différents moyens seront développés plus loin dans cette note.

 

Un vrai plan protéines doit avoir une dimension européenne

 

Les 7 précédents plans protéines français ont échoué parce qu’ils n’ont pas pris en considération cette donnée fondamentale. L’autonomie protéique de la France est absurde. Si l’Autriche recherchait également son autonomie, alors pourquoi certaines régions françaises - plus grandes que l’Autriche - ne s’y mettraient pas non plus ? Nous sommes dans un marché unique depuis presque 60 ans et notre politique agricole est commune.

 

Les lobbies des biocarburants ont tenté d’imposer leur vision dans le développement des protéines végétales. Ils profitent de ce besoin de production en protéines comme d’un argument supplémentaire en faveur de la production de biodiesel. Le plus important, ce sont les surfaces cultivées en colza et en tournesol. Peu importe que les huiles aillent dans l’alimentaire ou dans les biocarburants ; la quantité de sous-produits protéiques disponibles (tourteaux) reste la même.

 

Le plan protéines : un levier économique pour redresser toute l’agriculture européenne !

 

Un développement des protéines végétales n’a pas comme seul intérêt ou objectif d’améliorer l’autosuffisance en protéines. En rééquilibrant les productions, il permet de réduire les surfaces en céréales dont le blé qui est malheureusement devenu la culture par défaut en Europe.

Il suffirait de 4 millions d’hectares de plus de plantes protéagineuses, soja, pois et luzerne dans l’UE pour ne plus avoir d’excédent de blé à exporter en dégagement vers les pays tiers.

Les prix du marché intérieur des céréales remonteraient et les productions de blé, orge et maïs redeviendraient rémunératrices. Il faudra bien évidemment que la rémunération des cultures oléagineuses anticipe celle des céréales pour que l’intérêt économique de ces productions soit moteur et reste moteur. Sinon, leur développement sera impossible.

 

Revenir aux bases de l’agronomie

 

Aujourd’hui, les assolements sont principalement céréaliers, avec des rendements qui stagnent et un recours à la phytopharmacie qui ne diminue pas. L’introduction de légumineuses dans la rotation a bien d’autres avantages. C’est un très bon précédent qui permet :

  • de meilleurs rendements pour les céréales qui suivent avec de meilleurs taux de protéines,
  • de fabriquer et stocker de l’azote à moindre coût grâce aux nodosités,
  • de limiter les apports d’engrais azotés et la dépendance aux importations d’engrais. 
  • d’alterner les matières actives, de réduire les traitements, et par conséquent de mieux gérer le salissement  des parcelles, les maladies, les insectes avec une baisse non négligeable  du recours à la phytopharmacie.
  • la préservation des sols et de la biodiversité par l’allongement des rotations.

 

 

Filières et interprofessions : un pas en avant, deux pas en arrière…

 

Les coopératives agricoles n’ont jamais été motivées à développer la culture du soja. Cette plante n’a pas besoin d’engrais azoté, on peut utiliser des semences fermières. Ceci représente un manque à gagner pour l’agrofourniture. Coté aval des filières, le soja ne produit que 3 tonnes par hectare contre 7 pour le blé et 10 pour le maïs. Ces petits rendements ne font fonctionner ni les transports, ni les silos. Plus pervers encore, le rééquilibrage des cultures en faveur des oléoprotéagineux se ferait aux dépends des exportations de blé. Or les coopératives françaises ont bien souvent des parts dans les silos portuaires. C’est pour ces raisons qu’il existe un puissant lobbying des exportateurs de blé qui infiltre même les organisations agricoles afin d’imposer la « vocation exportatrice » en comparant les exportations françaises de céréales à celles des avions Airbus, sans ne jamais citer les chiffres européens ou encore aborder la question sous l’angle global des grains avec le déficit abyssal en huiles et protéines végétales.

 

Dans cet esprit, en France, les interprofessions Intercéréales et Terres-Univia tirent la couverture chacune de leur côté pour défendre leur plan protéine. Il est regrettable qu’elles ne travaillent pas conjointement et même fusionnent dans l’intérêt général car, au sein des filières, les opérateurs sont les mêmes.

 

Nous protéger pour améliorer notre indépendance alimentaire ne veut pas dire fermer les frontières

 

Dans l’UE, les surfaces cultivées en oléoprotéagineux représentent 18 - 19 % de la surface totale des grandes cultures. Ce chiffre est de 37 - 39 % aux Etats-Unis, 45 % en Ukraine ainsi que de 67 et 69 %respectivement en Argentine et au Brésil où la monoculture du soja est largement pratiquée avec même 3 récoltes en 2 ans. Nous constatons que les cultures d’oléoprotéagineux sont bien moins développées dans l’UE que chez nos concurrents et fournisseurs. Il en résulte une dépendance dangereuse pour notresécurité alimentaire en se fournissant auprès de pays qui ont des rotations trop courtes car il existe un risque sanitaire fort avec des maladies comme larouille qui peuvent décimer les cultures.

Notons que ce sont des pays riches (Chine, UE, Japon) qui sont les plus gros importateurs de soja, à l’opposé des pays importateurs de céréales qui sont majoritairement des pays pauvres. Un défaut d’approvisionnement sur le marché du soja se traduirait par une « flambée des prix » bien supérieure à ce que nous avons connu en céréales en 2007, 2010 et2021.

 

Pour toutes les raisons évoquées ci-dessus, - dont le rééquilibrage des surfaces avec les céréales - il est impératif de développer la production de protéines végétales au sein de l’Union européenne. Un véritable plan protéines doit avoir comme objectif d’accroitre les surfaces de cultures en oléoprotéagineux (soja, colza, tournesol…) de 4 millions d’hectares pour que ces productions représentent au moins 25 % des grandes cultures de l’UE. Malgré cela, nous resterions importateurs nets en protéines végétales. Les quantités importées devraient être contingentées dans le seul objectif de complémenter le déficit annuel de la production de l’UE.

 

Il existe une autre famille bien plus ancienne de plantes protéagineuses en Europe ; ce sont les légumineuses fourragères :luzerne, trèfles, lotier, sainfoin, vesce. Il semble qu’il n’y ait pas de statistique européenne sur les surfaces en légumineuses fourragères au sein de l’UE 27 ; ce qui montre que la DG Agriculture n’a pas mesuré pleinement l’ampleur du problème et les enjeux potentiels pour redresser l’agriculture. Nous savons que la surface de luzerne en France a été divisée par 10 passant de3 300 000 hectares en 1960 à 330 000 ha aujourd’hui. Nous savons que l’Espagne et l’Italie ont des surfaces en luzerne supérieures à celle de la France. La France représentant 22 % des surfaces agricoles de l’UE27, une augmentation des surfaces en légumineuses fourragères de 3millions d’hectares au sein de l’UE (soit 660 000 ha pour la France) nous semble être un objectif réaliste.

 

 

En termes de résilience, de dépendance extérieure, de vulnérabilité sanitaire, d’autosuffisance en aliments et en fertilisants, d’agronomie, de réductions de transports et de prospérité pour nos agriculteurs, ce rééquilibrage des productions s’impose.

 

Pour arriver à ces objectifs de développement de surfaces de cultures riches en protéines, il ne faut plus que les lobbies des sociétés d’import-export de grains et d’aliments du bétail puissent encore déstructurer l’agriculture européenne.

 

 

 

Notre scénario pour redresser l’agriculture européenne

 

Pour relever l’ensemble des prix agricoles, il faut commencer par améliorer notre taux d’auto-approvisionnement en huiles et protéines végétales

 

La première chose à réaliser est de faire remonter progressivement les prix des oléoprotéagineux pour que les cultures se développent aux dépends des céréales dont les volumes exportés chuteront et disparaitront progressivement. Il s’en suivra donc, également une remontée des cours des céréales au sein de l’UE. Des protections tarifaires variables devront être mises en place pour que les produits de dumping aux portes de l’UE ne puissent altérer ce redressement des prix agricoles européens. Le but sera d’atteindre un prix d’objectif sur le marché intérieur. Le prix des oléoprotéagineux devra remonter plus en proportion que celui des céréales pour que ce plan puisse réussir.

 

Les cours des aliments concentrés du bétail vont donc progresser ; il faudra que cette hausse soit plus que répercutée au niveau des viandes pour que les éleveurs de volailles, de porcs et de vaches laitières voient leur revenu progresser fortement et, qu’ils ne soient pas incités à arrêter ces productions pour se recentrer sur les seules productions végétales dont la rentabilité sera restaurée.

 

La viande bovine retrouvera de la compétitivité face aux viandes blanches (volailles et porc) dont toute l’alimentation fournissait un avantage comparatif à cause de son prix qui était déconnecté des coûts de production européens.

 

Nous proposons une augmentation annuelle de 20 % des prix agricoles et cela sur une période d’au moins 5 ans. Si cela peut choquer ;c’est pourtant le chemin inverse qui a été fait dans les années 1990-2000. Il ne s’agit que de corriger les erreurs et de redonner légitimement aux agriculteurs leur dignité. Parfois, de manière brutale et inattendue, les prix de certaines productions augmentent de 100 % sur une année. Les filières savent donc encaisser ces à-coups même quand ils ne sont pas prévus.

 

Malgré ce plan, nous ne serons jamais autonomes en protéines végétales en Europe. Nous devrons donc continuer à importer mais nous pourrons imposer des cahiers des charges avec nos exigences qualitatives, sociales et environnementales.

 

Nous devons mettre en place une LMR en glyphosate sur les produits destinés à l’alimentation animale. Alors que les pouvoirs publics et la société civile sont de plus en plus exigeants vis-à-vis des agriculteurs en matière de résidus de pesticides, il est anormal qu’à la fin de l’annexe 1 du règlement 396/2005, définissant les LMR dans tous les aliments, la catégorie« aliments pour animaux » soit vierge.

 

Ainsi, les services de l’Etat ne font jamais d’analyses sur les tourteaux ou les drêches. Cette aberration résulte probablement d’un très fort lobbying des géants du grain auprès de la Commission européenne.

 

Une étude de l’ONU de 2019, affirme que 25 % des pesticides utilisés en Ukraine sont illégaux. Le Brésil, sous Bolsonaro, a homologué des dizaines de nouvelles molécules. Jusqu’à maintenant, le libre-échange passait avant la santé publique et l’environnement dans les priorités de l’Europe! L’UE étant le marché le plus riche au monde, nos fournisseurs pourront se plier à cette nouvelle norme sanitaire comme ils ont pu le faire en développant très vite des filières de soja non OGM.

 

La PAC actuelle oblige les agriculteurs européens à cultiver au moins 3 espèces différentes sur leurs fermes. Dans l’Iowa ou l’Illinois il n’y a que 2 cultures : maïs (55 %) et soja (45 %). Nous importons donc du soja américain qui provient d’agriculteurs qui, s’ils étaient européens, seraient sanctionnés par la PAC. Pourquoi appliquer plus de contraintes à nos propres productions qu’aux importations ?

Coté déforestation, le Brésil et les multinationales du commerce intercontinental des grains et aliments du bétail refusent la mise en place de contraintes. De telles certifications sont douteuses et facilement contournables comme c’est probablement déjà le cas avec les importations d’huile de palme d’Indonésie.

 

Concernant l’effet de notre plan sur les huiles végétales, l’augmentation des prix des huiles des graines oléagineuses redonnera de la compétitivité à l’huile d’olive et au beurre, induisant une hausse de leur consommation. Ce sera une aménité positive qui favorisera la consommation de produits agricoles européens.

 

Pour ce qui est de l’estérification, la hausse des prix de l’huile fera stopper l’utilisation du colza dans la production de biodiesel. Nous ne voyons aucun inconvénient à ce que ces usines modifient leur sourcing en se tournant vers des huiles importées comme l’huile de palme. Ces huiles importées de piètre qualité doivent être utilisées en priorité dans nos moteurs et chassées de nos estomacs.

 

Nous avons déjà bien identifié que les groupes industriels et financiers intervenant dans le secteur des biocarburants seront les plus grands opposants à notre plan de redressement de l’agriculture européenne. Ces structures ont surfé sur un prix très bas des oléoprotéagineux pour développer leurs usines en Europe et particulièrement en France où les 2/3 de l’huile de colza produite est estérifiée pour finir dans des moteurs diesel, pendant que nos industries agroalimentaires cuisinent à l’huile de palme. Ces choix des années 1990 ne sont plus adaptés et sont une des causes de la situation agricole actuelle.

 

Si nous faisons déjà le point, sur nos premières propositions, nous voyons que notre scénario permettra de redresser les productions suivantes :

 

  • céréales,
  • oléoprotéagineux,
  • volailles,
  • porc,
  • viande bovine.

 

Indirectement, toutes les autres productions végétales dont les prix de marché se calent sur celui du blé vont voir leur rentabilité augmenter. Nous pouvons lister :

 

  • Cultures légumières sous contrat (haricot-vert, petit     pois, épinard…)
  • Cultures d’oignons, pomme de terre sous contrat,
  • Productions contractuelles de semences,
  • Cultures de diversification comme la fraise ou  l’asperge.

 

Les cultures maraichères (salade, choux…) verront leur cours se maintenir car si les prix baissaient, les agriculteurs diminueraient aussitôt leurs surfaces cultivées au profit des grandes cultures.

Nous aurons donc réinstallé un cadre qui permet à l’offre et à la demande de mieux fonctionner sur les marchés agricoles.

 

La production de lait de vache est une « industrie lourde » demandant un investissement dans un cheptel qui est en place pour de nombreuses années avec des génisses qui ne produisent qu’au bout de 2 ans. C’est aussi un sacerdote car produire du lait oblige à travailler tous les jours de la semaine et à n’avoir que très peu de jours de congés. C’est une production pour laquelle la transmission des savoirs est très importante. On est fils et petit-fils d’éleveur laitier et quand on arrête l’élevage, c’est définitif, sans retour possible. Les débouchés du lait sont multiples et sa valorisation est également très différente que l’on produise du Comté ou que l’on soit sous contrat avec de grands groupes comme Lactalis ou SODIAAL.

Bon nombre de laitiers souffrent de prix trop bas à la production et la revalorisation du lait est leur première revendication.

Une organisation européenne de producteurs laitiers, l'European Milk Board (EMB) propose u Programme de Responsabilisation face au Marché (PRM), une initiative visant à réguler la production laitière en Europe pour assurer des prix rémunérateurs aux producteurs.

Ce programme est conçu pour être appliqué lorsque le marché du lait est menacé de déséquilibre, en ajustant la production en fonction de la demande.

En période de surproduction, le PRM encourage les producteurs à réduire leur volume de lait en échange d'une aide financière, tandis que ceux qui augmenteraient leur production peuvent être soumis à des pénalités. Ce mécanisme vise, en adaptant la production à la demande, à éviter les crises, à la stabilité du marché laitier, garantissant des prix stables et équitables pour les producteurs laitiers.

Le PRM de l'EMB est donc un outil de gestion du marché laitier européen, conçu pour prévenir les déséquilibres en ajustant la production aux fluctuations de la demande, assurant ainsi la viabilité économique des exploitations laitières.

Les industries laitières implantées au sein de l’UE subissent des coûts de production, des normes et des contraintes qui sont européens. Il est donc anormal que, seule, la matière première qu’elles utilisent soit au cours mondial alors qu’elle est produite par des éleveurs dont toutes les charges sont également à un niveau européen. Pour la production de lait, il serait donc justifié de conserver un système d’aides financières dont la finalité ne serait pas une compensation de revenu mais une régulation évolutive de la production en fonction de l’état du marché. Les industries laitières, si elles souhaitent conserver des parts de marchés à l’export sur les pays tiers, seraient donc contraintes à rechercher des facteurs d’amélioration de leur compétitivité autrement qu’en « mal payant le lait ».

 

En fruits et légumes certains problèmes sont encore plus prégnants que dans les autres productions : le manque de solutions en protection sanitaire, le manque demain d’œuvre qui oblige à laisser des récoltes dans les champs, le coût de l’énergie sans oublier les importations à bas prix. Faire remonter les prix et donc la rentabilité de ces productions est la clé pour résoudre tous ces problèmes. Il est essentiel de taxer et de réglementer l’introduction de chaque espèce et type de fruits et légumes. Les marchés sont déstabilisés par des importations de pommes du Chili et d’Afrique du Sud, de kiwis néozélandais…

En tomates, les producteurs français ont été contraints de se replier vers la tomate cerise, un créneau qui était à l’abris des importations mais maintenant de très grosses sociétés marocaines inondent le marché de la tomate cerise toute l’année. Il est important de définir des quotas et des créneaux saisonniers d’importation pour ne pas perturber la production européenne.

Cette saisonnalité de libre-circulation doit également exister au niveau européen pour protéger les bassins historiques de production de fruits et légumes dans chaque état-membre. Pour la France, citons par exemple la tomate de Marmande, les fraises du Périgord, la cerise des coteaux du Ventoux…

Nos productions françaises régressent considérablement en fruits et légumes. Inversement, la progression des exportations des Pays de l’Est est constante. 

Nous devons également protéger et favoriser le développement des productions fruitières comme la banane et l’ananas dans les territoires ultra-marins des Etats de l’UE qui sont confrontés à la concurrence de pays voisins à faible coût.

 

 

Réduire les distorsions de concurrence intra européennes  et définir un modèle agricole européen pour orienter l’agriculture de l’ensemble des états-membres dans la même direction

 

Le marché commun, au début des années 1960, était un beau projet. L’objectif était que les agricultures, différentes entre chacun des 6pays fondateurs de la CEE, se complètent. Avec des niveaux de coûts de production semblables il n’y avait pas de problème. Chaque pays avait sa monnaie et des montants compensatoires monétaires (MCM) permettaient de réduire les distorsions de concurrence entre états-membres lors des variations de parité de monnaies comme suite à une dévaluation dans un des pays.

 

Quand les 10 PECO (Pays d'Europe centrale et orientale)sont entrés dans l'Union européenne en 2004, aucune mesure compensatoire n’a été mise en place pour protéger les anciens Etats-membres des fluctuations monétaires et surtout de l’effet concurrentiel des coûts économiques et sociaux qui étaient bien plus bas dans les pays entrants. Cet élargissement a été brutal pour certains secteurs économiques. Au fil des années, des pays comme la Pologne se sont modernisés d’une manière incroyable mais le niveau des salaires des normes et de la fiscalité bien plus bas qu’en France. Ceci leur permet de bénéficier d’une insolente compétitivité.

 

Les grandes productions végétales sont les moins concernées. On peut tout de même citer le développement de cultures de plantes aromatiques et à parfum en Bulgarie.

 

Ce sont dans les productions animales de type industriel que l’on observe des développements non encadrés d’élevages qui perturbent le marché allant jusqu’à remettre en cause la viabilité des modèles familiaux basés sur des produits de qualité dans nos bassins historiques de production .Nous avons déjà évoqué les productions de porcs en Allemagne et Espagne. Aujourd’hui le problème vient beaucoup plus de la Pologne pour le poulet, les œufs et maintenant le bœuf. Il existe en Croatie des projets de créations de poulaillers gigantesques.

 

En France, nous tentons vainement, via les SAFER et les CDOA, de limiter l’agrandissement des propriétés foncières et leur exploitation. Dans la majorité des Etats membres il n’y a pas d’entrave au développement de l’entreprise agricole. En l’absence d’une vraie Politique Agricole Commune, qui devrait traiter ce sujet au lieu de se limiter à la distribution de primes, nous assistons à des développements de modèles de production industriels et hors sols dans les régions où les investisseurs bénéficient d’avantages comparatifs.

 

Afin d’enrayer ces abus, nous proposons de lier au sol ces élevages de 2 manières :

 

  • Par l’alimentation des animaux : un pourcentage     évolutif de l’aliment consommé dans l’élevage devra être produit     localement et/ou dans la même structure juridique.
  • L’élevage devra bénéficier localement de la surface     agricole nécessaire à l’épandage des effluents d’élevages produits sur     l’entité juridique.

 

Ces contraintes ont été appliquées et acceptées relativement facilement en agriculture biologique (Règlement UE 2018/848). Il s’agit d’établir un équilibre entre la répartition de la production animale sur le territoire, la capacité des sols à valoriser la fertilisation organique, tout en favorisant l’autonomie alimentaire des élevages par la création d’un débouché local rémunérateur pour les productions végétales potentiellement utilisables en alimentation animale.

 

C’est l’absence d’une réelle politique agricole depuis 40ans au sein de l’UE qui a permis ces dérives. Seule la France a voulu prendre des mesures pour encadrer le développement de son agriculture mais elle s’est tirée une balle dans le pied et sa compétitivité agricole a fortement décroché. Nous sommes dans un marché européen ouvert depuis 60 ans et même mondialisé depuis 30 ans. Si nous voulons être souverains sur le développement de notre agriculture pour assurer notre sécurité alimentaire, il faut que nous soyons pleinement souverains en matière de politique agricole sinon cela conduit à« l’agricide » que nous connaissons actuellement. Ce ne sont ni des lois EGAlim, ni des LOA françaises qui ne garantiront du revenu et donc leur survie à nos agriculteurs.

 

La France qui reste le premier pays agricole européen se doit de prendre le leadership en matière de propositions pour un modèle d’une agriculture européenne à visage humain répondant à tous les défis qui se présentent face à elle. C’est le message que nous devons envoyer à Bruxelles au lieu de « chipoter » sur la répartition des aides.

 

La nature ayant horreur du vide, l’absence de synergie qu’aurait induit une politique agricole européenne forte est, en partie, à l’origine de l’apparition de ces distorsions de concurrence intra-européenne. Il est bien connu que, dans un groupe, quand le chef ne fixe plus les lignes directrices, les déchirements entre les membres apparaissent.

 

Si nous avions une vraie politique agricole européenne avec des modèles agricoles et alimentaires bien cadrés, les questions d’OGM, d’hormones, de LMR sur les produits importés et de l’entrée de l’Ukraine au sein de l’UE ne se poseraient même plus.

 

 

 Il est donc possible de redresser l’agriculture européenne en améliorant les prix à la production. Pour cela il est nécessaire de définir un cap cohérent et un ensemble de mesures à respecter dans leur intégrité. Il faut prendre conscience que nous sommes au chevet d’une agriculture très malade et que nous devons en priorité la protéger de ceux tous ceux qui par leurs actes risquent de lui asséner le coup létal. Comme pour un grand malade, le protocole que nous proposons doit être respecté dans son intégralité. Il n’y a pas de compromis possible au profit de lobbies qui n’y trouveront plus leur compte. C’est l’intérêt général, le sens commun, qui doit primer et non les« primes » de la Commission européenne. Derrière notre agriculture, il y a des familles de paysans, des modèles d’alimentation, une ruralité, les racines de notre société et donc l’ancrage de notre civilisation. C’est tout cela que nous avons l’ambition de défendre.